Les violences conjugales et intrafamiliales sont un fait de société majeur. On dénombre en France, en 2022, plus de 244 000 victimes de violences conjugales (+15% par rapport à 2021). Il s'agit principalement de violences physiques causées par des hommes.
L'ordonnance de protection a été créée par la loi du 9 juillet 2010 et modifiée depuis. Elle permet d'accorder en urgence à la victime de violences conjugales vraisemblable et qui est en danger, ainsi qu'aux enfants du couple, des mesures de protection judiciaires : interdiction pour l'auteur des violences de se rendre au domicile, attribution à la victime du logement commun et de l'exercice exclusif de l'autorité parentale…
Afin de favoriser la mise en œuvre rapide de l'ordonnance, la protection peut être accordée dès le moment de la révélation des faits, indépendamment d'un dépôt de plainte. Toutefois, un délai de 6 jours reste nécessaire au juge aux affaires familiales pour se prononcer en audience sur une demande d'ordonnance de protection, période durant laquelle la personne en danger n'est pas protégée.
La loi, inspirée d'un rapport parlementaire de 2023, améliore le dispositif de l'ordonnance de protection (moins de 6 000 ont été demandées en 2022) et crée une ordonnance provisoire de protection immédiate, afin de protéger les victimes dès qu'elles se signalent auprès de la justice.
Le texte initial a été amendé au cours de son examen par les parlementaires.
Renforcement de l'ordonnance de protection
La loi porte à 12 mois la durée initiale des mesures prononcées au titre de l'ordonnance de protection. Aujourd'hui, cette durée initiale est de 6 mois, avec une prolongation possible si entre-temps une demande en divorce ou en séparation de corps a été déposée ou si le juge aux affaires familiales a été saisi d'une demande sur l'exercice de l'autorité parentale. Cette durée peut être insuffisante en cas de situations particulièrement conflictuelles ou lorsque le couple ne peut pas bénéficier de la prolongation des effets de l'ordonnance parce qu'il n'est pas marié ou n'a pas d'enfant commun.
Un allongement à 12 mois permettra au bénéficiaire de l'ordonnance de protection (97% des bénéficiaires sont des femmes) de s'organiser (déménagement, changement d'établissement scolaire pour les enfants - 89% des victimes ont des enfants…).
La loi rappelle, par ailleurs, qu'une ordonnance de protection peut être délivrée même en l'absence de cohabitation du couple. L'appréciation du danger ne doit en effet pas être liée au critère de cohabitation. Ces dispositions visent, selon les parlementaires, à "résoudre le problème que pose la frilosité de certains juges" refusant de délivrer une ordonnance dès lors que le couple ne vit pas ou plus sous le même toit.
Deux autres mesures complètent l'ordonnance de protection :
lorsque le juge aux affaires familiales autorisera la victime à dissimuler son adresse à l'auteur des violences, elle sera aussi masquée sur les listes électorales, pour toutes les personnes demandant ces listes. Actuellement, l'article L37 du code électoral permet à tout électeur d'obtenir la communication intégrale des listes électorales, y compris les adresses des électeurs. Un décret d'application est prévu ;
le juge aux affaires familiales pourra accorder à la victime la garde des animaux de compagnie du foyer, animaux qui peuvent être un moyen de pression et de chantage notamment sur les enfants.
Création d'une ordonnance provisoire de protection immédiate
La loi crée une ordonnance provisoirede protection immédiate. Elle aura vocation à protéger les personnes en danger durant le délai de 6 jours nécessaire au juge aux affaires familiales pour se prononcer sur une demande d'ordonnance de protection "classique".
Le juge pourra, avec l'accord de la personne en danger, être saisi par le parquet. Une ordonnance de protection "classique" devra avoir été demandée.
L'ordonnance sera délivrée par le juge sous 24 heures, en cas de danger grave et imminent. Il pourra prononcer plusieurs mesures contre l'auteur présumé des violences :
interdiction d'entrer en contact avec la ou les victimes ;
interdiction de paraître dans certains lieux (domicile, lieu de travail de la victime...) ;
suspension du droit de visite et d'hébergement ;
interdiction de détenir une arme et obligation de la remettre aux forces de l'ordre.
Le juge pourra, par ailleurs, autoriser la victime à dissimuler son adresse.
Ces mesures seront prononcées à titre provisoire, le temps que la décision statuant sur la demande d'ordonnance de protection soit prise.
Comme dans le cas d'une ordonnance de protection, le procureur de la République pourra octroyer à la victime un téléphone grave danger (TDG).
Cette ordonnance provisoire sera aussi applicable aux personnes menacées de mariage forcé.
Peines en cas de violation d'une ordonnance
La loi prévoit que la violation des obligations ou interdictions imposées par l'ordonnance provisoire de protection immédiate sera puni de 3 ans de prison et de 45 000 euros d'amende.
Il en sera de même en cas de violation d'une ordonnance de protection "classique" (fixées aujourd'hui à 2 ans de prison et 15 000 euros d'amende).
Cette modification permettra au juge d'imposer à la personne ayant violé son ordonnance de protection le port d'un bracelet antirapprochement.
La loi prévoit l'application de ses dispositions outre-mer.
Source: Légifrance :
Comments